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Escrime pour les écrivains : Épée et bouclier

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    Vous avez tous déjà vu ces images de fiers combattants en armure, avec bouclier et épée. Ça tombe à pic, aujourd’hui, nous allons parler de ces armes.

     

    Comme son nom l’indique, l’épée à une main se manie… à une main ! Oui, je sais, ça ne vous avance guère. En résumé, l’épée à une main est une arme médiévale, globalement sur tout le Moyen-Age. Elle ne se manie pas seule, mais toujours avec un bouclier ou un écu. Retenez que ce genre de lame était utilisé en temps de guerre (quelquefois pour les duels en armure), donc sur un adversaire bien protégé.

     1. Epée une main    2. Bouclier

     

     

    A quoi ça ressemble ?

     

    Taille

    Moins d’1m, en général autour de 70/80 cm. Les lames les plus courtes servaient au combat à pied. Les lames les plus longues étaient plutôt utilisées à cheval (pour bénéficier de plus d’allonge).

     

    Forme de la lame

    Lame droite à double tranchant. La longueur et la largeur varient selon les régions.

     

    Poids 

    Entre 1k et 1kg200. Eh oui, première surprise, c’est une arme assez légère. Oubliez donc vos barres de mine de 10 kg qu’on doit prendre à deux mains.

     

    Comment ça se transporte ?

    Dans un fourreau de bois ou de cuir, au côté. On laisse au vestiaire les fourreaux dorsaux, s’il vous plait. Certes, ça a l’air cool, mais en vrai ce n’est vraiment pas pratique (essayez de vous ficeler un tuteur de jardin dans le dos et de le récupérer d’une main, pour voir…).

     

    L’écu

    Il s’agit d’un bouclier à la forme triangulaire. Il s’attache aux bras grâce à des lanières (énarmes), et est retenu autour du cou par une guiche, ou guige, (une sorte de bandoulière). On glisse le bras gauche dans les énarmes et on passe la guiche autour du cou.

    3. Intérieur bouclier

     

    Le bouclier est porté proche du corps, mais ne se tient pas collé devant, face à soi, mais formant un angle d’environ 45 degrés, de manière à ce qu’il repose un peu contre l’épaule et le genou afin que le bras seul ne supporte pas son poids. L’écu est en général fabriqué de bois plus ou moins épais, il peut être recouvert de cuir ou de lin pour plus de solidité.

     

    Il mesure entre 80 cm et 1m30 et pèse entre 2 et 5 kg. Oui, c’est assez lourd, mais gardez à l’esprit que, lors du combat, le bouclier va rester assez près du corps, on ne s’amuse pas à le manier à bout de bras. Le poids garantit également une certaine résistance aux coups, et donc une bonne protection au porteur. De plus, pour un combattant aguerri et bien entraîné, le poids n’est plus un problème.

     

    Les protections

    Contrairement à des styles plus tardifs, le combat à l’épée et au bouclier est un style militaire. On combat avec de solides protections.

     

    Au minimum, le guerrier revêtira un gambison, une sorte de veste bien rembourrée, qui amortit une partie des coups (notamment les coups de taille).

     

    Par-dessus le gambison, on rajoute une cotte de maille. Petit aparté, la maille est assez lourde, plusieurs kilos en général, mais en réalité, le poids est réparti sur tout le corps. La maille ralentira un peu les mouvements, mais pas tant que ça au final, d’autant plus qu’avec de l’entraînement, on s’habitue à évoluer avec cette protection.

     gambison-ferme-13-14

     

    Pour la tête, les piétons porteront une cervelière, avec ou sans protection nasale.

    nasal-dit-spangenhelm-v1  cerveliere-spangenhelm-

     

    Les cavaliers auront plutôt un heaume.

    demi-heaume

    Tous les casques sont les œuvres de Réchignac, batteur d’armure.

     

     

    Comment ça se manie ?

     

    C’est une arme qui s’utilise principalement de taille, c’est-à-dire qu’on cherche à trancher plus qu’à transpercer (l’estoc). Les coups sont assez simples : diagonaux de haut et bas, et de bas en haut, de la gauche vers la droite et de la droite vers la gauche. On vise les défauts des protections : le visage, les bras ou les jambes. Pas besoin de coups amples ou de cogner comme un sourd, le plus court chemin demeure la ligne droite, on frappe donc droit et vite.

     

    C’est un type d’escrime assez… frontal. On va dire que ça percute bien. Le but de ce genre de combat était de parvenir à percer les défenses de l’autre, ou à le sonner à force de lui taper dessus. Pour bien se représenter la chose, imaginez un combat de boxe, mais en armure : c’est frontal, ça cogne, mais c’est un art martial qui joue énormément sur la stratégie, sur les feintes, l’utilisation du bon timing.

     

    Malgré la taille du bouclier et l’équipement, les guerriers restaient assez mobiles (on avance, on recule, on contourne…).

     

    Outre les techniques d’épée proprement dite, le combat au bouclier intègre aussi des techniques de corps à corps. Le principe est assez simple : lorsqu’on arrive à une distance très proche, on peut essayer de faire tomber son adversaire, soit avec un croc-en-jambe, ou en tentant de le déséquilibrer. N’oubliez pas que les protections portées sont assez lourdes. Une fois que l’adversaire a perdu son équilibre, il va tomber plus facilement.

     

    Les gardes

    Il existe plusieurs gardes possibles, retenez-en deux :

     

    — L’épée à hauteur de la hanche droite, la pointe vers l’adversaire (garde défensive).

    8, garde basse

     

    — L’épée montée à hauteur de la tête, pommeau vers l’ennemi, lame vers l’arrière (garde offensive).

    9, garde haute

     

    Pour le reste, inspirez-vous des enluminures que vous pourrez trouver, elles sont une mine d’informations (La bible de Maciejowski, par exemple).

    10, gardes

     

     

    La défense

    Le bouclier défend le combattant, il reste au côté gauche et ne bouge presque pas. Donc s’il vous plait, oubliez le guerrier qui balance son bouclier pour empoigner son épée à deux mains et se jeter joyeusement dans la bataille.

     

    L’épée sert également à se protéger, mais par une défense plus offensive : on frappe pour parer le coup et attaquer en même temps.

     

     

    Les dégâts occasionnés

     

    Les douleurs du combattant débutant :

    Si votre personnage débute et apprend à manier ce genre d’équipement, il aura très mal aux épaules (avec l’impression tenace que ses muscles sont en train de se solidifier). Au départ, il souffrira au niveau du bras d’arme, à force de tailler avec l’épée. Le bras de bouclier est moins touché, car il bouge peu au final, et que ce sont les épaules qui encaissent.

     

    Les blessures types

    — Coups de taille dans les faiblesses des protections : le visage, les bras et les jambes.

    — Blessures dues aux chocs, allant de la contusion aux os cassés.

     

    Globalement, les chevaliers meurent peu au combat, car ils sont bien protégés et entraînés. Les piétons bénéficient de moins bonnes protections, et sont donc plus vulnérables.

     

     

    Les erreurs à éviter

    Comme toujours, le but n’est pas de décrire exactement un combat au bouclier et à l’épée, mais de garder un degré de véracité. Voici donc les clichés à proscrire :

     

    — Le bouclier qui ne sert à rien et qu’on balance dès les premières minutes du combat. Le bouclier est la meilleure protection, le but est de se planquer derrière, pas de le jeter.

     

    — Dans la même lignée : le héros qui enlève son casque au milieu de la bataille. Héros sans casque = héros mort.

     

    — L’épée pesante et difficile à manier. Rappelez-vous, autour d’un kilo. Moins lourd que votre sac de courses.

     

    — Le coup qui tranche en deux, malgré l’armure ou la maille. Oui, les épées tranchaient bien, mais de là à sectionner de la maille, du tissu épais, de la chair et des os, il y a une marge.

     

     

    Voilà, vous connaissez maintenant les bases du combat au bouclier et à l’épée XIIIe siècle. Pour ceux qui auraient envie d’aller plus loin, voici une petite bibliographie:

     

    — Un article sur le combattant au Moyen-Age.

    — Un autre sur les coups et blessures.

    — Et pour ceux qui voudraient se documenter sur le Moyen-Âge de manière plus généraliste, je recommande les ouvrages de George Duby, Jacques Le Goff, ceux de Philippe Cotamine pour la guerre au Moyen-Âge et ceux de Jean Flory et Dominique Barthélémy sur la chevalerie.

     

     

    Contributeurs à cet article (merci à eux pour leur temps et leurs réponses) :

     

    Gilles Martinez, de l’académie AMHE de Rochemaure.

    Sébastien Verlynde, du REGHT.

    Rechignac, batteur d’armures

    Thibault Pascual, forgeron d’épées

    Rachel Fleurotte, Sylvie Sabater et Amandine Thorignac pour les corrections (Merci les filles !)

    1 commentaire pour “Escrime pour les écrivains : Épée et bouclier”

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