Résumé
Enclave au sein des royaumes crépusculaires, abyme est un havre cosmopolite, haut lieu de la diplomatie, une cité phare majestueuse où dangers et guet-apens sont monnaie courante. Pour le farfadet Maspalio, c’est « sa » ville, qu’il connaît à la perfection pour en avoir exploré chaque sombre recoin, pour en avoir inlassablement arpenté chaque travée, place ou canal. Aussi paraît-il le mieux placer pour retrouver un démon qui a échappé aux abysses et rôde désormais dans les ombres. À vrai dire, il n’a pas le choix : Vladitch, un Advocatus diaboli, le tient sous sa coupe. Mais quand de surcroît un assassin se met à décimer ses proches, vivre en abyme se révèle bien périlleux, même pour un ancien prince-voleur…
Mon avis
Voilà quelques années que j’avais lu Abyme (pris par hasard dans une petite bibliothèque, bonne pioche), aussi, quand j’ai vu la superbe réédition de Mnemos, je me suis ruée sur l’occasion, et je ne suis pas déçue.
D’abord parce que l’édition est magnifique. C’est le même coffret que les crépusculaires (ouvrage qui se déroule d’ailleurs dans le même univers, et que j’avais aussi beaucoup aimé), et il est magnifique : beau papier, chapitres ouverts par des lettrines, reliure splendide… (Je déplore juste des oublis de saut de ligne dans la dernière partie, qui rendent parfois confus les changements de points de vue). Bref, si comme moi vous aimez les beaux livres (et adorez les contempler dans une belle bibliothèque), achetez cet ouvrage (et ne traînez pas trop, il est en édition limitée).
Côté histoire, on suit Maspalio le Farfadet, conjurateur et ancien prince voleur, qui se retrouve forcé de mener ce qui semble au départ une banale enquête, mais qui rapidement révèle des ramifications bien plus complexes. J’ai trouvé que l’intrigue était bien menée : on commence petit, pour embrasser des enjeux plus grands au fur et à mesure que la vérité se révèle. Si parfois on a l’impression que Mathieu Gaborit se perd un peu (notamment avec l’histoire du Double), tous les petits éléments plantés finissent par se rejoindre pour le grand final (notamment le fameux Traité des angles).
On retrouve l’univers des chroniques des crépusculaires, avec ses Danseurs, et ses Accordés qui font une apparition (et ça fait plaisir). Comme pour les Crépusculaires, j’aime beaucoup la poésie et la nostalgie qui se dégagent de ce monde, c’est beau, fragile et sombre à la fois, et pour moi, totalement enchanteur.
Côté écriture, bon ben c’est du Mathieu Gaborit : bien écrit, très fluide, là aussi, très poétique et rechercher sans jamais tomber dans la lourdeur et les effets artificiels.
Le personnage principal est assez attachant, prince voleur à la retraite, farfadet au milieu d’un monde peuplé d’humains, démons, sirènes et autres créatures. Maspalio est un Abymois « de cœur et de pierre », viscéralement attaché à sa cité. À travers ses yeux, on découvre Abyme, et on apprend à aimer cette ville.
À côté de lui gravitent un essaim de personnages plus ou moins développés. J’avoue que j’aurais aimé en savoir plus sur un certain nombre d’entre eux, notamment sur l’Opalin, que j’ai trouvé très intrigant.
Mais au final, le personnage le plus fascinant, c’est la ville en elle-même : Abyme, ville crépusculaire et secrète, avec ces lacis de rues, ses palais, sa foule cosmopolite. Abyme semble réellement vivante, une entité que révèrent ses habitants et à qui ils se remettent. C’est une ville que j’ai eu envie de visiter, et donc, ce roman achevé, je vais me plonger dans le Guide d’Abyme de ce pas.
En conclusion : un univers sombre et poétique, une écriture ciselée pour une histoire envoûtante.